Les vastes plaines de Sibéria... Tout était calme, alors que le soleil disparaissait lentement au lointain, rendant l'horizon rougeâtre. Il aurait bientôt une bonne raison d'être de la couleur du sang.
Drake était debout à côté de la route qui traversait inlassablement ces plaines, une route monotone et calme, plate. Autour de lui, d'autres hommes armés, ses compagnons de la Confrérie. De fidèles mercenaires renégats qui se battaient contre la royauté de Ra'Sibe depuis plusieurs mois déjà, et aujourd'hui ils allaient faire un assez gros coup. Ils étaient un petit groupe amassé là autour de la route et ils attendaient patiemment leur heure. Dans peu de temps, un important convoi de marchands venant de Ra'Sibe devait passer ici. Ils n'avaient pas encore de marchandise car ils allaient chercher des troupes à la frontière. L'allée était donc très peu gardé, le retour lui serait inattaquable, c'était donc le moment d'attaquer. La relève ne viendrait jamais à la frontière ce qui pourrait permettre par la suite à la troupe de Drake d'attaquer un poste frontalier en se battant contre des soldats fatigués attendant désespérément une relève qui ne viendrait pas.

- Ils devraient déjà être ici... Il y a quelque chose. Ils savent.
- Non, impossible, ils sont juste en retard, répondit calmement Drake.

Soudain, un roulement lointain se fit entendre, puis les bruits de sabots se firent plus proches. De longues caravanes tirées par des chevaux approchaient à vive allure et leur silhouette se distinguait déjà. Lorsqu'ils furent assez près pour voir les rebelles, ceux-ci se mirent sur la route leur barrant le passage et le convoi ralentit puis s'arrêta. Le conducteur du premier chariot descendit, épée à la main et cria :

- Que voulez-vous, brigands ! Nous n'avons rien ! Laissez-nous passer !
- Vous n'avez rien ? C'est dommage... D'où venez-vous ?

L'homme hésita un moment et finit par répondre :

- Nous venons de Ra'Sibe.
- Délégation royale ?
- Militaire.
- Où sont vos gardes ?
- Bien cachés.
- Rien à donner ?
- Non.
- Vous payerez de votre sang.

L'homme horrifié se retourna et fonça vers les autres chariots en hurlant, tandis que plusieurs rebelles allumaient des torches et les balançaient sur les chariots dont la toiture en toile prenait feu instantanément. Les renégats sortirent leurs armes et arpentèrent le convoi en tuant tout sur leur passage. Il n'y avait que des hommes, pour la plupart armés pitoyablement de dagues ou d'épée d'escrime de mauvaise qualité. Ils furent rapidement tués un par un par les hommes de Drake, qui était resté devant le convoi, l'air méfiant. Un de ses hommes revint vers lui :

- Ils sont tous morts, Drake. Les chariots sont vides, à part quelques caisses de nourritures et d'armes, rien. On fait quoi ?
- Brûlez tout.

L'homme repartit en retransmettant les ordres, et Drake palpa son front. Il avait un mauvais pressentiment. Il se coucha sur le sol et y colla son oreille. Il attendit longuement, et il entendit enfin ce qu'il pressentait. Des bruits de sabots lointains, mais rapides. Il se releva.

- Dépêchez-vous de tout brûler, ils ont vu la fumée de loin et on va avoir de la compagnie, foutez le feu et quitter le sentier ! Vite !

Les Nalamis mirent le feu à toute les caravanes et quittèrent le sentier, se regroupant à une centaine de mètres. Ils attendirent en regardant le lointain. Une ou plusieurs silhouettes se distinguaient.

- Qui sont-ils ? Ra'Sibe est trop loin pour voir la fumée. C'est peut-être d'autres voyageurs ou des marchands.
- Non... Leur odeur, tu la sens ? Le vent est contre eux, elle porte jusqu'ici... Je n'arrive pas à bien voir ce qu'ils sont, c'est comme si leur odeur était à moitié masquée...

Drake était intrigué. Il resta planté là, tout près du sentier tandis que ses hommes attendaient derrière lui. Qui viendrait jusqu'ici, alors que le feu des caravanes devait se voir de très loin. Des gens sensé devinerait que c'est un pillage, surtout avec le climat de guerre de ces temps obscurcis. Qui ?

L'odeur âcre de la fumée, la senteur froide et métallique du sang. Pas besoin d'avoir des sens sur-développés pour les sentir, même s'il se trouvait à plus d'une dizaine de lieux de là. Amidatelion abaissa sa tête massive de loup vers le sol, songeur... Et inquiet. Plus tôt dans la journée il avait eu vent d'un convoi Humain qui devait passer dans les environs, et de prime abord, l'information ne lui avait fait ni chaud ni froid... Mais à présent que cela ne faisait plus l'ombre d'un doute qu'elle avait brûlée, et que ses conducteurs avaient certainement tous péris, le Nalami commençait à craindre le pire.

Durant son court séjour à la Forteresse d'Ulrick, lors de sa promotion au rang de Commandant d'un détachement d'Assassins, le jeune Loup avait saisit, au hasard d'une conversation, des rumeurs courant sur des Nalamis qui lutteraient seuls, et surtout, à leur manière. Ami lâcha un profond soupir. Il n'aimait pas les Humains. Non, il les haïssait, mais en vérité, il haïssait encore plus les massacres inutiles.
D'ailleurs, il aurait préféré que ces renégats affrontent les Hommes sur un champ de bataille, à la loyale, plutôt qu'en leur tendant embuscades et pièges... Une ombre passa dans ses prunelles d'or. De quel droit se permet-il de les juger, lui qui passe sa vie à traquer ses proies, et à les mener droit à des traquenards ? Amidatelion secoua la tête avec un grondement mécontent. Et puis zut ! Lui au moins, ne s'attaquait qu'à des adversaires capables de se défendre ! Parce-que d'après les rumeurs... Certes, le jeune Nalami savait que les colporteurs sont rarement objectifs et aiment dramatiser, mais tout de même, ce genre de ragots ne partent pas de rien...

Déterminé, Ami décida d'aller voir par lui-même ce qui se passait là-bas. Après tout, on n'est jamais sûr de rien tant qu'on n'a pas vu soi-même, n'est-ce pas ?...

Lorsqu'il arriva sur le lieu du massacre (car il n'y avait pas d'autre mot), une grimace dégoûtée fendit la gueule du Loup. Après un rapide examen olfactif de l'endroit, il songea avec une certaine hargne :

*Des Nalamis, c'est sûr et certain. D'ailleurs, ils sont encore là. Je l'avais pas vu, celui-là...!*

En effet, trop absorbé par son analyse de la situation, Ami avait totalement occulté la présence de ce Nalami, debout au bord du sentier, qui semblait guetter quelque chose. Lui aussi avait perçu le tonnerre des sabots qui se rapprochaient, mais il aurait le temps de filer au loin avant même qu'ils ne le voient. Après tout, sa technique de combat reposait sur sa célérité, et non sur la force brute.
A la fois intrigué et d'assez mauvais poil après avoir découvert un tel gâchis, Amidatelion se rapprocha de cet homme, un Nalami plutôt imposant mais qui ne l'intimidait tout de même pas (une jolie cicatrice sur l'épaule gauche lui rappelait tous les jours qu'il avait déjà eu affaire à un Nalami-Lion au sale caractère) et reprit forme humaine, se campant solidement à trois ou quatre mètres de lui, crosiant les bras sur sa poitrine :

- On dirait qu'il y en a qui se sont bien amusés, dans le coin. lâcha-t-il froidement. Par curiosité, vous êtiez combien contre ces hommes qui devaient même pas savoir tenir une épée correctement ?

En colère ?... Ah ça, certainement ! Le jeune homme était un être au tempérament plutôt "chaud", qui prenait facilement la mouche.


[HRP : je suis partie du principe que tes hommes se planquent dans des fourrés pas trop loin ! =)]

Drake guettait l'horizon quand des pas extrêmement léger, de velours, se rapprochant de lui le tirèrent de sa concentration. Un loup. Mais ce loup ne tarda pas à se révéler être un Nalami, comme l'avait pressenti Drake. Le rebelle se tourna vers le Nalamis qui avançait désormais vers lui. Il le scruta de la tête au pieds, il était plus petit que Drake et moins bien bâti mais semblait agile. Drake se méfiait de ce genre de personne, il savait à quel point les apparences étaient trompeuses, et parfois, derrière les traits d'un gamin se cachait un véritable assassin. Drake ne lâcha pas un mot, dévisageant l'autre d'un regard à la fois froid et relativement neutre, comme désinteressé. L'autre Nalami finit par dire, en croisant les bras, avec un ton froid et doté d'une pointe de colère :

- On dirait qu'il y en a qui se sont bien amusés, dans le coin. Par curiosité, vous êtiez combien contre ces hommes qui devaient même pas savoir tenir une épée correctement ?



Drake adressa un léger sourire au Nalami tout en le fixant. Il sortit sa lourde Hache et la posa lourdement au sol, appuyant ses deux mains dessus. La lame n'avait aucune trace de sang. Drake décida d'être prudent avec celui-ci.


- Contre ces hommes ? Quels hommes ? Il n'y aucune trace d'hommes ici.

Drake regarda un cadavre près de lui d'un air dépité mais remit rapidement son regard sur l'étranger.


- De plus je doute que mes affaires te regarde, je suis seul ici et je garde la route. Si tu aimes renifler les cadavres, vas-y ! Ne te gêne pas pour moi. Mais dis-moi... Je trouve cela bien étrange qu'un Nalami, ou du moins ce qui y ressemble, - à moins que tu ne sois un Semi ? - soit en colère alors que des ennemis de notre peuple viennent de tomber. Allons, je vois deux possibilités. Soit tu es un des lèches-bottes d'Ulrick, soit un traître. Maintenant, je pense que tu devrais te présenter. C'est toi l'étranger ici. J'ai beaucoup trop parlé pour des futilités.

Drake passa un coup de langue sur ses lèvres sèches tout en continuant de fixer le Nalami, mais désormais avec un regard insistant. Celui qu'avait un prédateur en observant les gestes de sa proie. Il se demandait ce qu'allait répondre l'autre, car ce n'était que comme ça qu'il pouvait le nommer. Aux premiers abord il était en colère, et les paroles de Drake allaient surement l'énerver encore plus, bien qu'il n'y aucune once de haine dedans. S'il perdait son sang froid, Drake était prêt à l'attaquer. Bien sur, il ne ferait pas venir ses troupes. Il n'avait pas besoin d'eux pour une demi-portion qui avait osée déranger la mission de la Confrérie. S'il se dressait sur leur chemin, il devrait périr.

- Je hais les Humains autant qu'il est possible de haïr. Ils se croient au dessus des peuples au sang-mêlé, et parfois même au dessus des Elfes. Je ne me refuse jamais un petit meurtre ou deux, je l'avoue bien volontiers, mais jamais un tel carnage ! Et j'ai pour habitude de n'affronter des Humains capables de défendre leur vie, question d'honneur. Franchement, quel genre de personnes peut tirer du plaisir à ce genre d'horreur ?

Drake eut un énorme sourire carnacier. Lui. Il prenait un certain plaisir mêler au dégout, mais il devait l'avouer, tuer des humains était jouissif pour lui. Exprimer sa haine en écrasant leurs os et effaçant leur vie d'un simple coup de hache...

- Ah, et j'ai en effet manqué de politesse, même si ça semble décalé, vu la situation... Mon nom est Tenebrae. Et bien que je sois le Commandant d'un détachement dans l'armée Nalami régulière, je ne suis en aucune manière un lèche-botte, comme tu dis ! A propos... Tu comptes faire quoi pour les cavaliers qui arrivent ? Nan, j'dis ça parce-que moi je suis tout à fait capable de semer des chevaux, même en rase plaine, mais toi et tes hommes... Permet-moi d'avoir des doutes !

Drake sourit encore et fit un petit bond en arrière alors que le bruit du galop était désormais parfaitement audible. Il souleva sa hache et la soutint dans ses mains.
　
- Bienvenue sur les chemins de la gloire, Tenebrae. Tu es un commandant, un haut-gradé, ce n'est pas un lieu pour toi. Ici le petit peuple se bat contre l'injustice, retourne chez Ulrick regarder les massacres de loin dans ton fauteuil. Ces cavaliers sont humains, il n'y a aucun doute possible je ressens leur odeur. Surement une patrouille. Ils mourront, comme les autres, je n'ai pas besoin de fuir. Mais, si tu veux détaler à travers les plaines, pars, va-t-en. Personne ne te retiens. Bien. Aux suivants !
　
Désormais, les chevaux fonçaient vers le convoi en feu, et ils s'arrêtèrent à quelques mètres des deux Nalamis. Ils étaient 6. Des hommes en armures luisantes chevauchaient ces chevaux dociles et pieux. L'un d'eux mit pied à terre et dégaina son épée qu'il mit sous la gorge de Drake. Il y eut un léger bruissement dans les tallus et de l'agitement. Tous les hommes dégainèrent tandis que les chevaux s'agitaient.
　
- Encore toi...

L'homme retira son casque en métal et Drake reconnut un visage qui lui était familier. Oui, il avait déjà combattu une troupe de soldats dirigée par cette homme près de la frontière. Les retrouvailles risquaient d'être houleuses, car il l'avait laissé pour mort. Il était étonnant qu'il soit vivant.

- Comme on se retrouve.
- Je ne doute pas que ce carnage soit le fruit de ton labeur...
- Non, comme tu peux t'en douter j'ai mis mes services à disposition de ton roi !
　
Drake éclata de rire et l'homme donna un violent coup de pied dans le torse de Drake qui recula en arrière, grimaçant. Drake saisit sa hache et la balança de haut en bas avant de la figer dans le sol, près du pied de l'humain.
　
- Crève.
　
Drake releva brutalement son arme et donna un violent coup dans le thorax de l'humain, un craquement se fit entendre tandis que le fer ployait. L'homme fut légèrement projeté en arrière et les autres cavaliers chargèrent.
　
- Bats-toi, ou fuis, Tenebrae !

Alors que les cavaliers allaient atteindre Drake, les rebelles de ce dernier sortirent de leur cachette en hurlant, tous en forme hybride diverses et variées et attaquèrent les cavaliers. Un hybride ressemblant à un lézard bondit et faucha un cheval tandis que le bruit du fer qui s'entrecroise résonnait déjà dans les plaines.

Un léger sourire s'esquissa sur les lèvres du Loup. Lui, regarder de loin bien à l'abri les batailles ? Et puis quoi encore ! Non, il aimait trop le goût du sang de ses adversaires qui coulait dans sa gorge alors qu'il leur tranchait la carotide d'un coup de crocs net. Depuis ses cinq ans il parcourait les Terres seul, et il n'avait accepté qu'on l'aide une seule et unique fois. Alors se planquer derrière ses hommes, certainement pas ! Surtout qu'en vérité, commandant un détachement d'assassins, le champ de bataille ouvert n'était guère son lieu préféré pour combattre...

Néanmoins, malgré le côté rustre, voire parfois insultant de ce Nalami, Amidatelion pouvait aisément comprendre ce qu'il ressentait. Car même s'il ne se l'était jamais clairement avoué, il avait toujours été persuadé que les Humains étaient resposables de la disparition, et très certainement de la mort, de ses parents. Ce qui n'avait fait que raviver le feu de la haine qu'il vouait à cette race.

Ce furent six Hommes qui arrivèrent, juchés sur de bien belles montures, soit... Ces dernières semblaient cependant comme dépourvues de volonté propre, le regard éteint. Ami en eut ses oreilles qui se couchèrent légèrement de tristesse. Les Humains ne respectaient donc aucune vie animale ? Ou même autre que la leur ? Non, évidemment que non ! La seule exception à la règle qu'il avait en tête était Eäramir, l'un de ses lieutenants... Un Humain, oui. Mais si différent ! Ceux-là n'avaient rien à voir avec le jeune épéiste. Le jeune Loup pouvait sentir d'ici leur arrogance, ainsi que leur auto-suffisance, ce qui lui arracha une discrète grimace de dégoût.

Amidatelion observa l'échange qui eut lieu entre le Nalami et le chef de la patrouille d'un oeil curieux, en silence. Visiblement, ils se connaissaient. Et ils ne s'étaient pas quittés en bon terme, lors de leur dernière rencontre, c'était indéniable !

Très vite, le meneur des Humains fut jeté à terre, provoquant la charge de ses hommes.

- Bats-toi, ou fuis, Tenebrae !

- Fuir ? Et puis encore !

Amidatelion reprit apparence lupine et s'élança en avant. Il évita habilement la lance d'un cavalier, puis, d'un bond puissant, s'abattit avec force sur celui qui se trouvait juste derrière, plantant solidement ses longues canines éfillées dans la gorge de ce dernier. Les assauts du Loup étaient souvent inévitables, mortellement précis. D'ailleurs, il en était fier, et il savait pertinemment que c'était cela qui faisait sa force. Le jour où il ne pourrait plus être aussi vif et précis... Il y a de fortes chances pour qu'il en meure !
Lorsque la vie eut achevé de s'écouler du corps de sa proie, Amidatelion relâcha sa prise et bondit en arrière, se réceptionnant avec souplesse environ cinq mètres plus loin.

Le reste du combat se déroula sans réelle surprise. Les Nalamis l'emportèrent, bien évidemment. Que pouvaient moins d'une dizaine d'Humains face à des êtres à moitié animaux animés d'une rage presque palpable ?...
Amidatelion reprit apparence humaine, et entreprit de nettoyer ses doigts enduits de sang... En les léchant, le plus simplement du monde, alors que son regard d'or restait fiché sur le chef des renégats.

Drake enchaînait lourdement les coups de haches, l'armure du chef des cavaliers ploya rapidement et une giclée de sang s'échappa de son torse, aspergeant l'armure de Drake. Celui-ci continua son combat, le visage crispé. Il faucha littéralement les jambes de l'homme, terrifié qui tomba au sol, désormais unijambiste. Il décida de le laisser giser là et de s'en occuper plus tard, partant aider ses camarades. Le combat fut vite gagné, et tous les humains tués, ne restait plus que le capitaine. Drake rangea sa hache dans son dos et marcha tranquillement jusqu'à l'homme qui hurlait de douleur et de désespoir. La scène était plutôt horrible, et si cela aurait été un Nalami au sol, Drake ne l'aurait pas supporté. Or, c'était un homme. Il garda le sang froid et souleva le demi-macchabée du sol, ses restes de membres pendants lamentablement. Tandis qu'il fixait son visage pâle et marqué par la souffrance, Drake sentait le regard insistant et froid de Tenebrae. Il se sentit étonnamment gêné, pendant un moment, mais se reprit rapidement. Il reporta son attention sur le mourant. Il l'approcha de son visage et lui susurra à l'oreille :

- Il y a longtemps, vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur... Vous avez choisi la guerre, mais vous aurez le déshonneur. Je vous le jure. Maintenant, repose en paix, et ne t'inquiète pas, tes frères te rejoindront bientôt...

L'homme balbutia, du sang s'écoulant de sa bouche, mais Drake n'avait pas le temps pour les gérémiades d'un mourant. Il saisit la dague à la ceinture de l'homme et tout en reposant le corps au sol lui trancha la gorge. Dans un dernier gargouillis, l'homme vit la dernière image de sa vie; le visage d'un tueur d'humain. Un meurtrier. Un tueur qui se battait contre d'autres meurtriers. Il n'y avait que ça qui comptait.

Drake reposa la dague de l'homme dans la main du mort, entrouverte et ferma ses paupières. Il ne respectait pas les hommes, sauf ceux qui le méritaient. Celui-là avait survécu à la première rencontre avec Drake, il y avait un peu d'estime pour lui dans l'esprit étriqué du Nalami.
Ce dernier se redressa et se tourna vers Tenebrae en essuyant ses mains dans un long mouchoir blanc, bientôt pourpre. Les autres rebelles retiraient les lames des rares corps de Nalamis jonchant le sol et portaient les corps en dehors du sentier. Ils commencèrent à leur creuser des tombes, ils ne pouvaient pas les ramener jusqu'à la forêt où ils étaient nés. Ils n'avaient pas le temps, mais une sépulture et une lettre à leur famille y serait envoyés.
Drake marcha lentement vers Tenebrae, le visage ferme, neutre. Il s'arrêta à quelques pas de lui.

- Et maintenant ? Tu as vu de quoi nous sommes capable, ce que nous faisons. Notre combat. Que comptes-tu faire, hein ?

La scène qui s'était déroulée sous ses yeux alors qu'il continuait à se nettoyer les griffes à grands renforts de langue, y restant passablement insensible, lui avait parue... Grosteque. Pas dans le sens ou c'était ridicule, non. Plutôt dans le sens où après un tel massacre, cet accès soudain de considération lui apparaissait comme superflu. Après tout, qu'il fasse ce qu'il veut ! Ce n'était pas le problème d'Amidatelion.

Ce dernier ne quitta pas le chef des renégats du regard lorsque celui-ci s'avança vers lui tout en essuyant ses mains ensanglantées dans un bout de tissu auparavant blanc. D'ailleurs, il ne changea pas d'attitude lorsque celui-ci commença à lui parler d'une voix neutre, ne trahissant aucun sentiment. Avant de lui répondre, Ami acheva sa toilette d'un dernier coup de langue avant de jeter un rapide coup d'oeil sur ses griffes :

- Tu me dit ça comme un enfant qui en mettrait au défi un autre d'aller tout rapporter à leur mère. Franchement, je m'en fous.

Le jeune Nalami marqua un temps, durant lequel son regard glissa vers sa chemise blanche... Couverte de tâches de sang. Un soupir d'agacement lui échappa alors qu'il écartait les pans de sa veste pour constater l'ampleur des dégâts en ronchonnant à haute voix :

- Roooh, c'est pas vrai... Je suis bon pour un bain, moi... Hum ! Bref... souffla-t-il en s'éclaircissant la voix. Je peux tout à fait comprendre ton point de vue. Après tout, il me semble que tu es assez grand pour savoir ce que tu fais... Mais pas assez pour être poli, on dirait. Je t'ai donné mon nom. Je suppose que ça te tuerais de me donner le tien en échange ? Le principe de l'échange équivalent, tu connais ?

Un léger sourire sur les lèvres, le jeune Nalami attendait de voir quelle réaction allait pouvoir avoir cet étrange personnage...

[HS : depuis le début je me retiens, mais là, je craque... Au niveau de la présentation, fait attention, s'ilte plaît. Le texte en italique, les paroles en gras. Merci ! =)]

- Tu me dit ça comme un enfant qui en mettrait au défi un autre d'aller tout rapporter à leur mère. Franchement, je m'en fous.

Drake ricana de l'arrogance du jeune Nalami mais son expression se durcit rapidement. C'était un des larbins d'Ulrick, après tout, quoi qu'il en dise. Il fallait être méfiant avec ces utopistes quasiment pacifistes qui préféraient "se battre dans les rêgles". Sauf que les rêgles, pour Drake il n'y en avait plus. Les batailles rangées étaient d'une autre époque, il fallait se mettre à la guerilla, et aux raids. Plus d'adrénaline, plus d'impact, plus rapidement et plus efficacement. Le visage de Drake se durcit légèrement quand le jeune Nalami se mit à grommeler à cause de l'état de ses vêtements. La propreté, l'hygiène et les beaux vêtements, c'était bien superficiel, surtout par les temps qui courent. On est en guerre, pas à un défilé de mode. Drake écouta en silence le jeune impudent tout en finissant de s'essuyer les mains et de cracher dedans pour humidifier le sang sec qui ne partait pas. Son nom ? Alors il était temps que son identité se répande un peu plus. Et puis, peut-être qu'Ulrick finirait par le prendre au sérieux, au final ?

- Je m'apelle Drake. Dernier descendant de la lignée des Jiro-Ke. Et ! Quand tu reverras ton cher Ulrick, donne lui ceci de ma part... attends.

Drake tourna les talons et disparu derrière un chariot. On entendit alors un coup sec, et il rapparut avec une forme enrobée dans un drap couvert de sang. La forme était presque ronde, mais irrégulière, et le drap attaché avec une corde pour ne pas qu'il s'en aille. Drake jeta la forme à Tenebrae. Il y avait dedans la tête d'un vieillard humain, un parchemin coincé dans sa machoire sous l'effet de la rigidité cadavérique. Et dessus, griffoné maladroitement, une sorte de testament du vieux. De quoi faire larmoyer quelques utopistes. Drake voudrait voir la tête d'Ulrick ou de son assistant qui ouvrirait le paquet !

[Désolé je ne savais pas que c'était si grave.]

[Je lock.]