La créature qui fait peur ( libre cette fois )

Je ne m'attendais pas vraiment à cette réaction. Même pas du tout... Pas parce que je n'aurais pas pensé ça d'elle, simplement parce que jamais personne ne s'est comporté avec moi comme ça, aussi gentiment. Elle chercha à me rassurer autant que par le geste que par ses paroles. L'effet n'avait pas été immédiat, mais tout de même réconfortant. A partir de ce moment je me pris d'affection pour cette femme qui m'était complètement étrangère mais douce et extrêmement gentille. Elle faisais tellement pour moi ! Moi, une simple serveuse même pas fichue d'être d'une race normale...

- Merci... Merci beaucoup soufflai-je

La voiture s'était arrêtée et elle m'aida à descendre et avancer jusqu'à chez elle. Je trébuchais un peu mais grâce à son soutient je me reprenais et reprenait le chemin comme je le pouvais.

Laureline emmena l'infortunée à l'intérieur. C'était une maisonnette sans prétention avec une salle à vivre au rez de chaussée et deux chambres à l'étage. Voyant que l'emmener dans la chambre ne serait pas une sinécure, elle l'adossa quelques secondes contre le mur, partit rapidement à l'étage et revint avec une couche déroulante qu'elle déplia sur le sol. Puis elle fit s'allonger Nayumi dessus.

"C'est pas hyper confortable, mais c'est mieux que rien. Je vais chercher de quoi te soigner, ne bouge pas."

Elle repartit immédiatement dans la salle adjacente, la cuisine a priori.

Je n'avais jeter qu'un rapide coup d'œil à la pièce, même si en d'autres circonstances je l'aurait trouver très belle. Elle n'était pas extraordinaires mais pour moi qui vivant dans une petite chambre à l'auberge c'était un grand luxe. La femme m'adossa contre le mur le temps de chercher quelque chose de plus confortable. Quand elle revint elle m'aida à m'allonger dessus, je lui sourit en guise de réponse. Alors qu'elle tournait le dos pour aller dans la pièce d'à côté je remarquais sa queue de renard. Hein ?! Su le coup je crus que je délirais, comment ne m'en étais-je pas aperçue plus tôt ? Mais pourtant... Pourtant c'était bien vrai alors... Alors elle était comme moi ? Vraiment ?! J'en était toute abasourdie et heureuse ! eut être tellement que je du faire un geste brusque s'en m'en apercevoir. Une vive douleur me parcourut, et, grimaçant, je me restreins à me tenir tranquille. Je verrais bien à son retour. D'ailleurs quand elle revint la question fusa tout de suite

- Est-ce que... Vous êtes comme moi ?.. Je veux dire..

Je pointais du doigt sa queue touffue.

Laureline revint au moment où Nayumi se refaisait mal. Elle avait alors un linge propre dans les mains et une bassine d'eau chaude.

"Ah là là, j'ai dit de pas bouger. Tu vas rouvrir tes plaies!"

Elle vint rapidement auprès d'elle et déposa la machine. Le linge lui échappa lorsque la Nalami posa la question tant redoutée : étaient-elles de la même race. Un frisson parcourut le dos de Laureline. Évidemment, elle ne pouvait mentir sur sa nature, mais elle aurait préféré ne pas avoir à en parler. Prenant l'air de rien, elle reprit le linge et le trempa silencieusement dans l'eau. Elle souleva le haut de Nayumi et baissa légèrement son pantalon afin de voir la lourde blessure intégralement.

"Oui, d'une certaine façon nous sommes semblables."

Il n'y avait plus le dynamisme et la joie qui avait précédés ce moment. Elle était alors plus calme, plus posée, presque triste. Elle fit mine de se concentrer sur la plaie, sur laquelle elle passa délicatement le linge mouillé. Nayumi put ressentir une violente douleur, bien qu'amoindrie par la chaleur de l'eau. Laureline ne dit rien de plus, s'affairant à nettoyer la plaie, attendant une réponse, un jugement.

La femme rousse s'était alarmée quand je m'était agitée. Elle était arrivée rapidement vers moi déposer la bassine d'eau mais quand elle entendit ma question le linge lui échappa des mains, ce qui ne m'avait pas échappé. Je ne dis rien sur le coup, l'observant. Elle n'y répondit pas dans l'immédiat, préférant tremper le linge dans la bassine d'eau, en silence. Visiblement j'avais touché une corde sensible sans même avoir fait exprès. Mais je ne voyais pas en quoi... Qu'est-ce que la race avait de si tabou ? C'est vrai que c'était problématique de s'intégrer aux humains qui nous toléraient à peine mais quand même, j'étais étonnée. Alors qu'elle examinait ma blessure, profonde et large qui était d'ailleurs tout sauf beau à voir, elle finit par me répondre, quoi que vaguement. D'une certaine façon ? Elle n'avait pas l'air bien heureuse non plus, et sa jovialité habituelle ( j'avais beau la connaitre à peine, j'avais clairement remarqué cet aspect de son caractère ) avait disparue, la laissant plutôt sérieuse et calme. J'eus le pressentiment qu'elle ne dirait plus un mot aussi m'étais-je décidée à prendre la paroles, après avoir serrer les dents à la vive douleur qui venait de me parcourir alors qu'elle nettoyait ma plaie.

- Je suis désolée de vous avoir mise mal à l'aise avec ma question... Je ne pensais pas à mal. Pas du tout même, ça me rend plutôt heureuse de voir qu'on peut être comme moi. Parfois je me sens si seule... Mais, que voulez-vous dire par "d'une certaine façon" ? Je n'ai pas bien compris. enfin... si vous ne voulez pas en parler, je comprendrais bien, je ne suis pas bête j'ai bien vu que vous êtes triste depuis que j'en ai parler.

Laureline se trouvait face à un sérieux problème. Tandis qu'elle nettoyait la plaie de l'infortunée, les questions fusaient. Elle en avait trop montré, comme toujours, et elle ne pouvait pas s'en cacher. Elle finit par lâcher :

"Je suis Nalami, oui, mais je n'ai plus vraiment de lien avec mon peuple. J'aime autant ne pas trop en parler, si ça ne te dérange pas."

Des mensonges, encore des mensonges. masquer la vérité, se cacher, échapper à son peuple, tel était le destin des filles de Séléné, son destin. Mais visiblement, cette fille ne savait pas qui elle était. C'était une bonne chose, elle n'aurait donc pas à protéger son identité, d'une façon bien peu morale. Toujours sérieusement, elle changea de sujet.

"Ta blessure est profonde, il va falloir un moment pour que ça cicatrise. Je vais la panser, mais tu vas devoir garder le lit pendant quelques jours."

Apparemment c'était vraiment un sujet délicat. Bien que je ne l'avais pas forcée à y répondre, j'aurais quand même du tenir ma langue. Ça se voyais bien que ma question la mettait mal à l'aise. Tss... fichue curiosité. N'a-t-on pas dit quelque part déjà que c'est un vilain défaut ? Si, et c'est bien connu, et pour cause, parfois c'est déplacé. En réponse je hochais la tête pour lui certifier que je ne m'étalerais pas là-dessus. Curieuse mais pas trop, car avant tout je respectais les autres. J'aurais très bien put lui "arracher les vers du nez" comme on dit mais ce n'était pas mon genre du tout. Mais alors là pas. Et puis je n'étais après tout qu'une simple étrangère dont-on-doit-s'occuper-sinon-elle-aurait-finit-par-crever-dans-une-rue-sur-son-trottoir et surement pas une personne de confiance, c'est à dire une amie. Pourtant cette jeune femme m'inspirais vraiment confiance : gentille et amicale. Oh je ne la connaissais pas au fond mais m'y était un peu attachée. Peut être par ce que c'était juste ma sauveuse ?

Alors qu'elle s'occupait de la plaie toujours, et prit à nouveau la parole changeant de sujet. Je fus contrariée et ravie à la fois. Contrarié parce que "quelques jours" ça voulait dire plusieurs journées non payées, et à rattraper une fois rétablie ! Donc deux fois voir trois fois plus de boulot ce qui n'était d'ailleurs pas bon pour la santé fragiles que j'aurais encore même rétablie. Mais pas de chouchoutage, à l'auberge on travail, on gagne de l'argent et tant pis s'il nous arrive une bricole on est pas là, pas d'argent. Mais d'un autre côté je m'en réjouissait car ces plusieurs jours voulaient dire que j'aurais l'occasion de la connaitre un peu plus, et cette perspective me réjouissais. D'ailleurs en y pensant je n'ai jamais eu d'ami... Ce méchant souvenir me serra un le cœur. J'espérais sans doute un peu trop d'elle...

- D'accord... Mais je vous promet que je vous rembourserais, une bouche à nourrir ça coût cher ! Et euh... c'est quoi votre nom ? Non parce que je me vois mal vous appeler tout le temsp Ma Sauveuse hein, c'est toujours mieux un prénom.

Spoiler:

Laureline lui lança un regard sévère mais visiblement joué.

"Si je te vois débourser le moindre cristalis tu me vexera à vie."

Elle reprit son attitude normale, pas particulièrement enjouée, mais au moins souriante. La plaie était propre. Elle déroula une longue bande de tissu et s'affaira au bandage.

"Je m'appelle Laureline, et en effet, "Ma sauveuse" c'est un peu trop pompeux pour moi. Je suis tombée au bon endroit au bon moment disons. Heureusement d'ailleurs parce que vu la seconde personne qui est arrivée, je ne donne pas cher de ta peau."

La jeune femme fit une moue sévère en disant qu'elle serait vexée à vie que je la rembourse. Sa réflexion eut pour effet de me faire rire un peu. Très légèrement, ça faisait mal quand même ça. Bon, peut être que je ne le ferais pas alors... ou discrètement.
Alors qu'elle s'attelait à présent à me mettre un bandage, ce qu'elle dit me fis tout d'abord sourire puis me laisser songeuse.

- Euh.. oui, elle était étrange cette fille... Une euh Lange qu'elle à dit. J'en avait jamais vu, tu savait que ça existait ça ?

Je lui souris gentiment. Finalement je me sentais un peu plus à l'aise pour arriver à la tutoyer. C'était assez difficile pour moi, je n'avais pas l'habitude et je ne le faisait qu'avec mes collègues de travail, comme eux je les croisaient un bon millier de fois tout les jours.

- En tout cas c'est joli ton prénom.

"Merci, le tien n'est pas mal non plus."

La Nalami avait enfin terminé son bandage. Elle avait tâché de ne pas trop le serrer pour éviter de l'étouffer, mais il fallait qu'il tienne, malgré tout. Le tissu se tinta légèrement du sang de la blessée, preuve que la plaie avait été correctement nettoyée et les saignements quasi stoppés.

"Ne te lève pas pour le moment, et ne fait pas de gestes brusques, tu risquerais de rouvrir ta plaie. Tu as perdu pas mal de sang, il va te falloir un moment pour retrouver un sens de l'équilibre normal. Je vais te préparer à manger. Si tu le peux, tâche de dormir."

Elle reprit la bassine et le chiffon ensanglanté, et repartit en cuisine.

Je lui souris légèrement, et acquiesçai pour lui certifier que j'avais bien compris. Ne pas bouger, surtout pas de gestes brusques. Dormir. Je ne me sentais pas fatiguée, ou du moins avais-je l'impression que je n'y arriverais pas. Je soupirai, lasse, fixant un point au plafond. A quoi rimait ma vie ? Est-ce que c'était réellement bien ce que j'étais ? Je commençais de plus en plus à me le demander. Je n'étais normale que pour quelques personnes, pour tout le reste je restais une abomination, une erreur, un monstre.... Il suffisait de voir mon état et de s'imaginer ce que ces tarés m'auraient fait si je n'avais pas réussis à m'échapper. Ou encore ces deux hommes dans la rue... Le balafré... J'avais trop peur de le revoir, cet homme me pétrifiais d'effroi. Pour vivre fallait-il que je me cache comme une lâche ?

Non...

C'est avec une idée naissante que je finis malgré tout par m'assoupir. Tombant doucement dans la douceur d'un rêve, l'esprit bien loin de toute inquiétude, loin des douleurs aussi. Simplement reposant.

[ je te laisse le choix du temps que tu dors ^^ ]

[ mmmh, petit sommeil de deux heures va dire ^^ ]

Lorsque Nayumi se réveilla, elle était seule dans la pièce. Laureline était allée au marché, espérant ramener de quoi faire un plat chaud. La maison était particulièrement calme. A côté de la couche improvisée de la Semi, il y avait un bol d'eau fraiche. La blessure était moins douloureuse, elle pouvait bouger, mais elle tirait suffisamment pour savoir qu'un geste trop brusque et s'était la catastrophe.

C'était calme, assez pour savoir que mon hôtesse n'était pas là. Ma blessure me tirait, ce qui me fis grimacer. Pas vraiment de douleur puisqu'elle était déjà amoindie, plutôt de frustration. Je jurai, pestai. Ce ne servait à rien mais c'était plus fort que moi.

- Je déteste ne rien pouvoir faire... marmonnai-je

Je jetai un regard à côté de moi et y aperçut de l'eau. J'eus un petit sourire, j'avais faim mais au moins n'aurai-je pas la gorge sèche. Tout doucement, en tachant de ne pas brusquer mon corps devenu fragile, je me redressai et me penchai pour attraper le bol d'eau. Soupire de soulagement. Dégâts : zéro ! C'est avec stupéfaction que je remarquai que javais autant soif, j'avais vider de bol avec empressement. Reposant le bol, je me demandai si je pouvais bouger un peu. Marcher. Juste pour voir, mais sans forcer. La réponse était non, je m'en rendis rapidement compte.

- Évidement, idiote Me rabrouai-je.

J'avoue que c'était idiot de me parler à moi-même mais j'avais moins l'impression que le silence pesait. Bon il ne me restait plus qu'à attendre alors.

Laureline rentra à peine deux minutes plus tard, avec un panier comportant quelques légumes d'assez grosse taille, et un drap sur l'épaule. Sa tenue n'avait rien à voir avec celle de leur rencontre. Une robe, assez simple, couleur marron-beige, avec un trou derrière pour laisser passer sa queue de renard. Elle avait un sourire radieux, d'autant plus lorsqu'elle s'aperçut que sa patiente était réveillée.

"Ah, tu es réveillée. J'ai acheté de quoi faire une bonne soupe. Ça va mieux?"

Ah! Ma sauveuse était de retour, toute joyeuse et avec surtout... A manger ! Là c'était mon ventre qui serait content. Je lui rendis un sourire lumineux.

- Oui, ça va un peu mieux. Je croix que je n'arriverais décidément jamais à te remercier suffisamment.

Me hissant de mes bras je réussi à m'assoir à peu près convenablement, ça m'étais assez pénible de restée allongée telle une mourante. Étant plutôt de nature très active, c'était assez frustrant de devoir rester sans bouger pendant des heures. Bien sur, Laureline s'inquiéterait de me voir gesticuler au risque de rouvrir ma plaie, et moins je brusquerais ma blessure plus vite, et mieux, je guérirais, aussi je tachais de faire attention.

- J'ai dormi longtemps ?

"Une bonne demi journée. Ceci dit, c'est le minimum vu le sang que tu avais perdu."

Elle déposa ses courses par terre, juste à côté, et commença à retirer la couverture pour observer la plaie.

"Je vais devoir changer ton bandage, mais déjà, ça ne saigne plus, c'est une bonne chose."

Je l'écoutai, hochai la tête. Une demi-journée, pourtant moi je n'avais eu l'impression que de quelques minutes à peine. Cependant je n'ai jamais eut beaucoup sommeil l'ayant même très léger. Je lui souri légèrement quand elle annonça que ma plaie ne saignait plus, ce qui était bon signe. Mais autre chose me préoccupait.

- Laureline... La prochaine fois que tu sortiras.. tu pourrais passer à l'auberge s'il te plais pour avertir que je ne pourrai pas travailler un moment ? Ça serait vraiment gentil.

Soudain mon ventre émit un gargouillement,rompant ainsi le court silence. Je ris légèrement, ce qui m'attira une une vive douleur et une grimace qui remplaça aussitôt mon éclat. Grimaçant je déclarai :

- Je croix que j'ai un peu faim.

Laureline eut un petit rire.

"Je vais te faire quelque chose de chaud. Pour ton patron, ne t'inquiète pas, c'est un ami à moi, je m'arrangerai avec lui."

En effet, Laureline fréquentait les auberges de la ville de longue date, et la plupart des tenanciers l'avaient à la bonne. Il faut dire qu'elle avait l'art d'apporter de la bonne humeur, et son physique avantageux attirait la clientèle.

La Nalami partit en cuisine, tâchant de rester près de la porte pendant la préparation afin de pouvoir discuter avec la malade.

Je suivis du regard la Nalami qui s'éloignait en direction de la cuisine. Je restai un peu songeuse à ses paroles. En faite cela ne m'étonnais pas des masses qu'elle soit amie avec quelqu'un comme le Patron, même si je me demandais comment ils avaient fait le devenir, sa rencontre. Étant de nature curieuse une histoire basique comme celle-ci était m'intéresse. Un peu tout à vrai dire ; La vie des autres me passionne ? Qui sait. Il n'empêche que de la part de mon patron apprécier des êtres tels que moi et Laureline n'était pas bien étrange.

- Laureline ? Dis-moi, je me demandais, quel est ton métier ? Tu as l'air de connaitre pas mal de monde, je ne pense pas trop me tromper. Tu dois êtres assez... Réputé non ?

Je me passai la main dans les cheveux, ajoutant :

- Enfin, c'est qu'une impression.

Spoiler:

La queue de la Nalami se redressa et se hérissa à la question mortelle : son métier. Elle n'avait aucun mensonge en tête, et ne pouvait pas être honnête. Avec un sourire pas très assuré, elle répondit :

"Oh, tu sais, ce n'est pas trop en rapport avec mon métier. mais tu connais les mœurs des humains, les Nalamis ne sont pas super appréciés. Je me suis fait une place, pour ainsi dire, comme je suis naturellement joyeuse, c'est un peu contagieux."

Elle avait détourné la question au possible, mais réfléchissait déjà à une réponse, sentant qu'elle reviendrait tôt ou tard sur le tapis.

Tient, elle n'avait pas répondu. Cette réaction éveillais une curiosité d'autant plus grandissante en moi. C'était volontaire sans aucun doute, reste à savoir pourquoi. M'en voudrait-elle si je le lui demandais ? Peut être qu'en m'y prenant bien...

- Oui, je suis bien placée pour me rendre compte de leurs mœurs, tu intégration en est d'autant plus impressionnante Laure. Emh, ça t'embête si je t'appelle comme ça ?

Je laissai un petit temps histoire qu'elle me réponde, et continuais, curieuse mais sans trop la brusquer.

- Mais dis-moi, tu n'as pas vraiment répondu à ma question... Aurais-tu honte de ton métier ?

J'avais lancé une très légère pique, histoire de voir sa réaction, avec un ton assez léger. Vraiment.. curiosité quand tu me tient !

Honte? D'une certaine façon, oui. D'une autre, triste, de voir son art et celui de son peuple ainsi corrompu. Mais qu'aurait-elle pu faire? Feignant toujours la joyeuseté, elle répondit seulement à la première question.

"Je préfère Laureline. C'est long à dire mais j'aime ce nom."

Elle savait bien mentir, elle savait bien faire croire qu'elle allait bien. Mais plus elle parlait, plus son cœur se durcissait, la glace et la roche mêlées, prêts à se fendre sous la pression de son fardeau. Lorsque la seconde question vint, elle esquiva de nouveau.

"J'ai des amis qui m'appellent Renarde, à cause de ma queue, et de mes façons qu'ils disent. C'est Hibert l'autre fois qui me disait que j'étais trop maline pour être aussi gentille. Il a commencé à phantasmer sur un fantôme qui me hanterai pour me faire faire des choses bizarres. Il avait bu, mais le coup de cruche lui a remis les idées en place."

Elle ponctua sa phrase d'un nouveau rire, tâchant de s'attacher à ce joyeux souvenir, pourtant moment blessant où elle aurait pu être découverte, emportée par les effets de l'alcool. La peur omniprésente d'être découverte la pesait, le sang sur ses mains la brûlait. Elle se réfugiait dans cette fausse joie, pour oublier, pour se fondre. Jamais elle ne l'avouerai.

**Je fuis. C'est l'unique chose que je sache faire réellement.**

Laureline esquivait la question, il n'y avait pas de doute. Que pouvait-elle bien faire qui la poussait à ne pas en parler ? Quel métier à ce point gênant pouvait-elle donc exercer ? Cela piquait énormément ma curiosité, et en même temps je sentais autre chose comme... De la tristesse peut être ?

Elle avait raconté une petite aventure dans une auberge avec humour et riant à la fin. Je ne sais pas trop pourquoi mais je sentais quelque chose de plus profond. Un pressentiment, ou juste de la paranoïa ? En tout cas je lui répondis alors que sans bruit, et avec précautions, je me relevai.

- J'espère que tout ces racontars ne t'affectent pas Laureline, on dit des choses assez péjoratives sur les renards, qui d'ailleurs ne sont pas vrais. En plus quand les hommes bois ils ne savent plus ce qu'ils disent, ça je m'y connais !

Je tremblais un peu et tenais vraiment à peine debout. La blessure me coûtait de l'énergie, j'avais perdu pas mal de sang et rester allonger pendant un bon moment n'arrangeaient rien c'était certain. Il n'empêche que je pris tout mon courage à deux mains et avançais pas à pas, avec quelques grimaces tout de même. Finalement j'arrivais dans la cuisine et stoppait d'un geste les possibles protestations de ma logeuse, qui maintenant devait avoir repéré que j'étais debout, une blessée c'est quand même pas très discrète.

- Non. Non, ne dis rien." dis-je en ayant le souffle coupé par mon petit parcourt du combattant.

Sans plus un mot je m'approchait de la Nalami et la serrai d'un seul coup contre moi. Faiblement vu mon état, où je m'y appuyais un peu sur elle sans le faire exprès aussi.

- Laureline... Je ne sais pas ce qui te perturbe, t'affecte mais je voulais te dire que quoi que tu ai fait tu n'a pas à t'en reprocher. Tu es quelqu'un de bien... N'oublie jamais ça. Je suis certaine que tu ne penses pas à mal et si tu as besoin d'en parler moi je serais là et je ne te jugerais pas. Ça fait du bien de se délivrer d'un poids quelques fois.

La renarde avait toujours son sourire aux première paroles de la semi, mais lorsque cette dernière se... jeta, pour ainsi dire, sur elle, par un mauvais réflexe, Laureline manqua de l'assommer de la tranche de la main. Heureusement, elle stoppa son geste à temps, le transformant l'air de rien en main rassurante qui tâchait de la maintenir debout.

Mais ses mots la touchèrent, profondément. Elle n'en dirait rien, elle ne croyait même pas à ces paroles, aussi sincères puisse-t-elles être. Pourtant, elle suffirent à percer la carapace qu'elle s'était construite avec le temps, et malgré tout ses efforts, une larme perla. Elle la masqua en serrant la semie contre elle. Là, pendant un instant, elle repensa à cette chaleur sincère, celle des siens.

Craquer ainsi, devant une parfaite inconnue? Elle ne pouvait se le permettre, elle n'en avait pas le droit. Pour son clan et pour tout ce qu'elle avait accompli pour survivre, elle ne pouvait se le permettre.

Son cœur se resserra, pris dans l'étau de la honte et de la détresse. La pierre se reforma, se renforça, pour effacer toute trace de ses sentiments, ne laissant qu'un masque de joie dans un sourire innocent qui n'en avait finalement que le nom. Mais elle ne la lâcha pas. Malgré ce que lui dictait son cerveau, elle ne la lâchait pas. Pendant quelques secondes seulement, elle voulait y croire. Juste un peu, avant de sombrer de nouveau.

» Il fait sombre... [libre]
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La créature qui fait peur ( libre cette fois )

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